Lendemain douloureux d’un Référendum au Congo-Brazzaville

Après plusieurs mois mouvementés politiquement- consultations, dialogue national officiel de Sibiti, dialogue de l’opposition à Diata, formation de deux groupes s’imposant comme opposition (le FROCAD et IDC, constitués d’anciens ministre, membres de partis alliés au parti au pouvoir PCT), annonce du référendum tant redouté puis qualifié de «coup d’État constitutionnel», manifestations pro ou anti référendum, arrestations, blessés et morts au nom de la liberté d’expression, moyen de télécommunications coupés ou d’une qualité amoindrie- ; est finalement arrivé, ce qui a été qualifié par certains commentateurs comme le jour-J du Congo-Brazzaville.
En effet, malgré tout ce tumulte et une opposition féroce à la tenue même de ce référendum, ce dernier a finalement eu lieu le dimanche 25 octobre 2015. Quelle lecture de ces événements? Peut-on les interprétés comme une victoire du camp du OUI, au détriment du camp du NON? Les partis d’opposition se résigneront ils face aux résultats, qui semblent donner le OUI pour vainqueur? L’appel au boycott aurait-il finalement servi ou desservi leur cause? En allant de l’avant avec une proposition de Constitution et donc la réalisation du référendum, le parti au pouvoir a-t-il renforcé une image de «va-t-en-guerre» inattentif au peuple tout en prétendant agir pour le peuple?
Une victoire du OUI controversée et qualifiée de «camouflet»
«Le projet de Constitution a été adopté», le « texte de nouvelle Constitution [entrerait] en vigueur dès sa promulgation par le président de la République » a déclaré, ce 27 octobre 2015, le ministre congolais de l’Intérieur et de la Décentralisation, monsieur Raymond Zéphirin MBOULOU.
Avec 92, 96% de suffrages exprimés et un taux de participation de 72,44%, l’enjeu est désormais ailleurs, dès à présent. Il faut savoir garder raison et tourner la page dirait-on car le rapport de force a pris le dessus sur cet enjeu très partiel en lieu et place des règles démocratiques et de gouvernance électorale. Pour les partisans de la majorité, c’est une question d’évolution institutionnelle censée porter le pays vers l’émergence et cette émergence ne pourra être visible qu’à travers le nouveau texte fondamental qui institue de ce fait un régime semi- présidentiel.
Entre temps, quel serait le dessein de cette nation? Quel serait l’avenir politique de l’opposition congolaise qui a été mise à mal tout en ayant démontré sa capacité à s’unir et stimuler l’éveil citoyen. L’opinion tant nationale qu’internationale a assisté à l’exécution des méthodes peu démocratiques, à travers les arrestations arbitraires des jeunes pacifistes, l’interruption de la connexion internet et mobile, et un traitement orienté de l’information de la part des medias locaux, en faveur du pouvoir.
La vision du Congo uni semble être partagée, et il serait difficile d’envisager une construction consensuelle, devant une nouvelle Constitution qui classe dans l’oubli celles de 1992 et de 2002. L’objectif étant atteint pour le parti de la majorité et ses alliés de surpasser le principe de l’inviolabilité d’une Constitution qui a été à la base de ce rapport de force entre une opposition sans arme et un pouvoir usant de toute sa force coercitive.
Les insuffisances de cette crise appellent à l’émergence d’une nouvelle classe politique. Ce serait l’unique façon de mettre en avant des hommes et des femmes loin cette boulimie du pouvoir totalitaire qui habite les politiques depuis l’indépendance du Congo à nos jours. Pire encore le plus grand perdant, c’est cette jeunesse sur qui tous les espoirs sont portés. Elle n’a pas su imposer sa voix au centre de ce débat auquel l’intérêt pour certains est le partage du pouvoir. Bien que l’on semble lui avoir volé une partie de son rêve, on sait toujours compter sur elle, car elle a montré aux yeux du monde qu’elle a son idéal de la vision républicaine.
L’histoire retiendra ce non-évènement, comme on a pu lire ce 27 octobre sur la page Facebook de l’écrivain franco-congolais Alain Mabanckou,:
«A l’heure où je lis que le OUI au référendum illégal sur la Constitution congolaise aurait remporté à 92,96% (un score stalinien juste pour permettre à un seul individu de se représenter en 2016 alors qu’il a été président pendant 32 ans) je pense à ces lycéens que j’ai rencontrés à Mpaka (Pointe-Noire), aux jeunes Congolaises et Congolais auxquels une fois de plus – peut-être cette fois de trop – on vient de voler et violer le désir de prendre leur destin en mains. Quand on refiuse on dit nNon. Et le peuple congolais sait qu’il a dit NON à cette MASCARADE !!!!»
Rappelons que la prochaine élection prévue au Congo-Brazzaville c’est l’élection présidentielle…là encore ce serait un autre épisode avec un scénario déjà prévu à l’avance? wait and see